Autosuffisance ou Souveraineté alimentaire ?

"Mal nommer les choses, ajoute du malheur au monde" - Albert Camus

Beaucoup d'articles utilisent les termes à la mode, d'Autosuffisance et de Souveraineté alimentaire, sans vraiment faire de différence. Et pourtant, même si notre objectif commun est la sécurité alimentaire, les méthodes peuvent grandement diverger.

Faisons un point lexical, pour mieux comprendre les implications de chaque solution.

Autosuffisance : c’est se suffire à soi-même, donc ne pas avoir besoin des autres. On parle, par exemple, de station spatiale autosuffisante. Cela revient à produire soi-même toute sa nourriture (et de se passer de ce qu'on ne peut pas produire). Cela induit un mode de vie en Autarcie (en grec, ‘qui se gouverne soi-même’) se traduisant par une coupure physique et philosophique du reste du monde. L'utopie d'un monde en autarcie, se rapproche souvent d'un mode de fonctionnement anarchiste, isolé, comme s'il s'agissait d'un pays isolé.

Mais se couper du reste du monde, c'est aussi se couper de leur aide en cas de difficulté locale (climatique, politique, etc.).

Ça n'est évidemment pas l'objectif d'une Ferme prônant l'ouverture et le partage. Cette notion nous semble donc éloignée d'une approche écosystémique (échanges pérennes entre plusieurs systèmes et sous-systèmes).

Autonomie : est la faculté d'agir librement, sans dépendre de l'autre. L'autonomie alimentaire est donc la possibilité pour une entité (famille, commune, état, …) d'agir de manière indépendante pour choisir ses modes d'alimentations, de productions, de distributions.

Dans un contexte international où notre alimentation est contrainte par des approvisionnements quotidiens, on comprend qu'en cas de blocage du trafic (pic pétrolier, guerre, changement de politique d'exportation, taxation, etc.), notre autonomie à s'alimenter est clairement remise en question.

Chercher l'autonomie alimentaire, c'est agir pour conserver nos choix d'alimentations, et donc ne pas tout miser sur un seul modèle d'approvisionnement (International / Local), dans le but de garantir notre sécurité alimentaire.

Souveraineté alimentaire : présenté pour la première fois par Via Campesina (Voie Paysanne) lors du Sommet de l'alimentation organisé par la FAO (Nations Unis) à Rome en 1996.

"C'est un droit international qui laisse la possibilité aux populations, aux États ou aux groupes d'États de mettre en place les politiques agricoles les mieux adaptées à leurs populations, sans qu'elles puissent avoir un effet négatif sur les populations d'autres pays."

Cette notion va donc plus loin que l'Autonomie, puisqu'elle rappelle la nécessite de coopérer avec les autres pays (régions) afin de ne pas favoriser des politiques locale qui leur nuiraient.

Il est donc important d'avoir conscience du poids des mots. Car l'objectif recherché par l'autosuffisance n'implique pas les mêmes décisions qu'un besoin d'Autonomie, ou de Souveraineté alimentaire.

Plus que jamais nos besoins de sécurité alimentaire, de santé et de diversité imposent des choix citoyens qui peuvent être encouragés et favorisés par nos modes de consommations. La nature nous inculque la Diversité, qui passe par un choix conscient des modes d'approvisionnements que nous souhaitons.

Certains sont prêts à arrêter le chocolat car il ne pousse pas localement. Pas moi ! Pour mon plaisir altruiste, et pour soutenir les petits producteurs locaux … de l'autre côté de l'hémisphère.